Canta la Calle


 

 

Cante la Calle



Sans papier


J’écoute et je marche – mes rêves avec moi –

je cherche des cartons pour dormir,

mon chien me suit, je trouve un ami ;

que passe la pluie pour que je poursuive mon chemin !

 

Je n’aime pas les souvenirs, je préfère les rêves

ils réchauffent l’âme et me font rire,

les solvents anesthésient la vie

et les autres me reprochent les souffrances qu’ils m’infligent.

 

CHŒUR :

Tu me donnes un document avec mon nom ?

tu me donnes mes papiers d’identité ?

Ma mère ne peut venir les signer

Je ne sais si mon père existe vraiment…

Tu ne peux pas être payé, je ne peux pas payer –

Je n’ai à présenter que ma vie et ma dignité.

 

Elles sont nombreuses les années passées dans cette ville,

J’ai quatorze ans, j’ai pu en faire le compte !

Je connais la rue et sa brutalité,

Et aussi une vie de grande liberté.

 

On me dit que j’ai aussi des droits,

Qu’il existe des lois qui veillent à mon intégrité,

A quoi servent ces lois, si en rue,

Tu n’as pas de droits que si tu n’as pas de papiers.

 

 

Prière du matin

Texte anonyme du livre de prière de I. Larrañaga

 

Seigneur,

Dans le silence de ce jour qui se lève,

je viens de te demander paix,

sagesse et force.

 

Je veux voir le monde

avec des yeux remplis d’amour,

je veux être patient, plein de compassion,

humble, doux et bon.

Je veux voir, au-delà des apparences,

tes enfants comme toi-même les vois,

pour apprécier la bonté

de chacun d’eux.

 

Ferme mes oreilles à toute rumeur malveillante,

garde ma langue de la médisance,

que seules les pensées positives

trouvent place aujourd’hui en moi.

 

Que ma vie soit bienveillance et justice

pour que tous ceux qui s’approchent de moi

sentent ta présence.

 

Revêts-moi de ta bonté, Seigneur,

Fais qu’en ce jour je sois un reflet de ton visage.

Amen.



MoJoCa

 

CHŒUR :

Mojoca : C’est le Mouvement des Jeunes de la Rue

 

Comme il est difficile de laisser son passé derrière soi,

Comme il est difficile de suivre les règlements.

Auparavant, les étoiles me berçaient quand je m’endormais ;

Comme le réveil est douloureux !

 

Une main amie, sans y penser,

Me fait voir la lumière ;

Ce sont mes compagnons,

Ils sont porteurs d’une véritable espérance !

 

CHŒUR :

Mojoca : Le fondement du Mojoca est l’amitié libératrice.

 

Il faut se soumettre à une discipline sévère

Pour faire grandir sa personnalité.

Qu’ai-je déjà perdu ?

Que suis-je prêt à donner ?

 

L’éducation, je la trouve ici,

Pour acquérir connaissance et respect ;

Et même si je tombe en chemin

Je cherche la force de repartir :

 

CHŒUR :

Mojoca : Les règles du Mojoca, c’est nous-mêmes qui les créons.

 

Je vois en moi cette douleur

Je veux la transformer en liberté

Je cherche en moi les valeurs

Qui constituent ma véritable personnalité.

Maintenant je veux changer

Ce qui pour moi est une difficulté,

Chaque fois je prends davantage conscience

De la valeur de l’amitié.

 

Mojoca : Mojoca respecte les personnes



La Ville a froid

Chanson pour voix à capella et narrateur

 

Chœur :

La ville a froid

la pluie tisse sans fin son rideau

l’air et la fumée dansent

au coin sans se mouiller.

Parlé :

Je ne vis plus dans la rue, la rue est une expérience très dure

Chœur :

parce que nous subissons humiliations et mauvais traitements.

Parlé :

Beaucoup de gens pensent que ne nous sommes pas des êtres humains

avec des sentiments et des rêves

Chœur :

et des rêves… Nous savons pourquoi nous luttons ! pour qui nous luttons !

Parlé :

Pourtant cela, ils ne le comprennent pas non plus et nous traitent de déchet.

Chœur :

Je ne suis pas partie de chez moi par caprice, personne ne s’est occupé de moi.

J’espère que tu ne l’oublies pas…

Parlé :

Si nous sommes dans la rue, c’est parce que nous n’avons ni maison, ni famille, ni personne qui nous parle, nous aime et nous comprenne.

Chœur :

Cela, nous ne le trouvons que dans la rue,

Elle est notre famille. Si nous avons faim, nous cherchons à manger dans le marché ; si nous avons besoin de vêtements, nous ne pouvons pas en acheter, nous n’avons pas d’argent.

Parlé :

C’est pourquoi ils pensent que nous sommes des délinquants.

Chœur :

que nous sommes des délinquants…



Suyapa

Texte de Gérard Lutte.

 

Pendant que je terminais la rédaction de mon livre, j’ai appris que tu avais été atrocement suicidée.

Quelques mois auparavant, tu m’avais raconté ta vie, tu avais déjà quitté la rue et tu rêvais d’aider ceux qui y vivaient encore…

 

« Voler » c’est le nom qu’ils donnent,

lorsque le pauvre récupère quelques miettes

de ce dont il a été dépouillé…

Nous dormons sur des cartons,

pour ainsi dire, à l’étroit ;

nous partageons notre amitié

contre le froid du monde et de la nuit.

 

Ref :

et pendant que tu me racontais tes projets,

avec une telle envie de vivre,

indomptable, courageuse,

d’une volonté à toute épreuve,

je pensais en moi-même :

comme ce serait bien, comme ce serait bien,

d’avoir une fille comme toi.

 

Ton père, tu ne l’as pas connu,

ton oncle a abusé de toi et après lui

ceux dont on ne connaîtra jamais l’identité ...

Ton rêve était d’agir pour que ne soit plus bafouée

la dignité de la femme,

que grandisse l’espérance au Guatemala !

 

Certaine de réaliser tes projets

tu as décidé de reprendre des études,

Tu as intensément vécu à Suyapa,

défiant sans arrêt la mort.

Tu as connu le respect et l’amour des femmes,

fière de ton passé vécu dans la rue.

Quelle connaissance de la vie tu as acquise

à 17 ans !

 


Une fleur

Par l’amour que tu éveilles en moi

Je sens mon cœur se dilater

Et mon esprit, silencieux,

Regarde au plus profond de moi

Regarde ce petit être qui aujourd’hui

Tressaille au son de ta voix :

Que son père ne lui fasse pas défaut

Que jamais ne lui fasse défaut l’amour !

 

Tu me sers dans tes bras et tu me dis

Comme une évidence :

« S’il est vrai que le destin

Nous fait cadeau de cette fleur,

Nous grandirons avec la force

Que donne l’amour,

Et de te sentir ici près de moi

Me remplit d’espérance :

Que le miracle qui grandit en toi

Nous rapproche davantage de Dieu ».

 

Tu as vu mes larmes,

Tu connais mes chansons,

Tu partages mes rêves

Et tu me parles d’amour ;

Je veux en rire sachant que ce sont mes chimères…

Nous savons combien de force, respect et joie…

Nous savons combien ce choix sera difficile !

 

Tu as vu mes larmes…

 

Par l’amour que tu éveilles en moi

Je sens mon cœur se dilater.



Un enfant de la rue

(texte anonyme)

Dans la grisaille des rues de la ville

ou dans les terres arides de villages perdus,

errent de toutes parts entre vice et crasse

des visages sales, des yeux éteints,

des mains vides, des rêves noirs.

Et dès leur jeune âge, ils découvrent hébétés

un monde d’égoïsme, d’avidité et de mort

qui les abandonne à un destin incertain.

 

Honte sur moi d’appartenir

à une société qui ne partage rien

qui enlisée dans ses choix absurdes,

oublie ces enfants qui sont la promesse

d’un monde à venir peuplé d’hommes de bien.

 

Honte sur moi pour ignorer

la complicité dont je suis coupable !

 

Parce que nous ne faisons rien pour revendiquer

les droits de ces enfants qui mendient notre pitié.

S’ils inhalent de la colle, c’est pour oublier

qu’ils sont la honte de cette société cruelle.

 

Nous sommes coupables de ces vies brisées,

de ces poings serrés, de cette agressivité.

Jamais ils n’ont senti quelque main amie,

comment attendre d’eux qu’ils sachent aimer ?

 

Quelle honte j’éprouve devant tant de misère,

parce que j’ai des oreilles et n’entends pas

ces voix d’enfants qui réclament justice

et que Dieu même semble ignorer.

Comme est cruelle la faim qui les tenaille,

quelle tristesse dans leurs yeux qui ne savent plus pleurer,

et comme une feuille chassée par le vent,

leur voix n’arrive pas jusqu’à nos oreilles sourdes.

 

Quelle misère que d’avoir le ciel pour seul toit

et de vieux journaux en guise de matelas,

et le froid qui vous transperce les os

dans les nuits sans fin de la solitude.

Honte sur moi pour ignorer

la complicité dont je suis coupable !

 

 

"Prière du soir"

Psaume 4

 

Quand je crie, réponds-moi,

Dieu, ma justice!

Toi qui me libères dans la détresse,

Piti é pour moi, écoute ma prière!

 

Fils des hommes,

Jusqu'où irez-vous dans l'insulte à ma gloire,

L'amour du néant et la course au mensonge?
 

Sachez que le Seigneur a mis à part son fidèle,

Le Seigneur entend quand je crie vers lui.
 

Mais vous, tremblez, ne péchez pas;

Réfléchissez dans le secret, faites silence.
 

Offrez les offrandes justes

Et faites confiance au Seigneur.
 

Beaucoup demandent :

« Qui nous fera voir le bonheur? »

Sur nous, Seigneur, que s'illumine ton visage!
 

Tu mets dans mon coeur plus de joie

Que toutes leurs vendanges et leurs moissons.
 

Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors,

Car tu me donnes d'habiter, Seigneur,

Seul, dans la confiance.



Nous allons changer le monde !

 

CHŒUR :

Nous allons changer le monde, nous allons le changer,

nous allons le changer, nous allons le changer !

 

Dans la rue, on ne ferme pas les portes,

on ne cache pas la violence.

Sors et retrouve cette liberté de parler

que la société t’a volée.

Nos voix sont blessées

mais elles sourient à nos rêves,

à l’amitié sincère,

c’est ainsi que nous trouvons la vérité !

 

CHŒUR :

Nous allons changer le monde, nous allons le changer,

nous allons le changer, nous allons le changer !

 

Le chant dans les yeus d’un enfant

qui dort, sans toit, dans la ville,

nous apporte le message du changement

qu’il nous revient de réaliser.

 

Et si le bruit et le stress qui t’entourent

t’empêchent d’écouter,

sors sans hâte, que l’espérance

et la désolation parcourrent ta ville.

 

CHŒUR :

Nous allons changer le monde, nous allons le changer,

nous allons le changer, nous allons le changer !

Qui juger ? Qui est coupable

de cette douleur ancienne qui est la nôtre ?

Comme une maladie elle fait partie de notre vie,

et pourtant elle tue l'humanité !

 

Notre conscience est masquée sous le couvert

de l’indifférence dont nous faisons preuve,

et pourtant, tout au fond de nous, nous savons

que maintenant c’est l’heure du changement !

 

le chant est dans la ville,

ouvre la fenêtre et laisse-le entrer !

Retrouvons le désir

et alors il faut passer à l’action,

au fond, nous le savons –

que nous allons vaincre !

 

le chant est dans la ville,

ouvre la fenêtre et laisse-le entrer !